28 avr. 2007

Il y a une fracture...

Quand je parle de fracture, ce n'est pas de la double fracture ouverte de l'un des étudiants français, au soir de son premier entrainement de foutbaule, en septembre dernier, qui lui a valu d'attendre sur le bord du terrain pendant 45 minutes en observant l'intérieur de son tibias. Les deux ambulances d'Athlone ayant déjà décalé pour se rendre sur deux accidents de la route, sans doute deux étudiants irlandais qui n'avaient pas leur permis. On peut d'ailleurs saluer la capacité des ambulanciers de Galway à faire en 3 quarts d'heure un trajet sur des petites routes qui prend, pour le français moyen que je suis, 2 bonnes heures sans la pause caféine. Mais comme je vous en ai déjà parlé, je vous renvoie à mon article sur les morts violentes sur mon ancien blog [lien].

Non, je veux parler de la fracture numérique. Celle que j'ai failli me faire au coccis en tombant à la renverse quand on m'a raconté cette anectode. J'y accolle la mienne, afin d'étayer le constat.

Il faut savoir que le cours de Business Management, que je suis avec intérêt, nous impose de faire un Business Plan (préparer la création d'une entreprise), et les équipes sont mélangées entre les étudiants internationaux et les Irlandais. Le principe (que l'on peut discuter), est que l'on ne peut pas modifier une équipe puisque quand on est embauché par une entreprise, on n'a pas le choix de ses collègues. Entre nous, si je crée ma boîte, je n'embaucherai pas le premier venu, mais je comprends ce que veut dire le prof : il n'a pas envie de recevoir ni de traiter les con-doléances de chaque étudiant. On est quand même deux promos de 150, ça fait potentiellement une sacrée perte de temps.

J'ai avec plaisir rencontré mes deux collaboratrices au bout de quelques mois de recherches (l'ai-je déjà mentionné ?) et j'ai pu donc commencer à travailler sur mon gros tiers. 3 "partners", ça fait logiquement un business plan découpé grosso-modo en 3. Je me suis absenté 3 semaines (je ne vous ai toujours pas dit où j'ai emmené on épouse en voyage de noces !! les indices sont suivis d'une astérisque) avec mon pc sous le bras. Outre que l'Internet ne fonctionnait pas là-bas (*), le courant... était en 110 Volts(*). Même si après une discussion en espagnol(*), nous avons réussi à obtenir de l'électricien qu'il nous fasse une dérivation (illégale) de la clim(*) qui elle était en 220 Volts(*), je n'ai pas franchement avancé ma partie du projet, puisqu'en rentrant il me restait une semaine. J'ai préféré passer mes journées avec Clémence au bord de la piscine non chauffée à 27°C(*), où à la plage sous des cocotiers(*) à boire des Cuba-Libre(*) en fumant de gros cigares(*) et profiter du sable blanc(*) et de l'eau transparente(*), tout crémé de lait protecteur indice 60(*), ce qui ne m'a pas empêché de me prendre des claques(*) bien violettes sous ma chemise à manche longue(*). Tout comme mon ami Laurent qui bosse dans des mines d'uranium, j'ai brillé dans la nuit. Quelques balades en bateau, un baptême de plongée pour admirer un fond très fourni en corail et en poissons multicolores et une autre sortie sous-marine à faire frémir Oncle Philippe... Le rêve.

Je dis frémir, c'est de peur. Clémence m'a longuement raconté son propre baptême de plongée, à Tahiti : descente à 6 mètres, 20 mintutes, avec un moniteur que ne lâche jamais le poignet. Là, première plongée à 15 mètres, pendant 45 minutes, le moniteur se retournant de temps en temps pour voir si l'on suivait. Heureusement pour lui, la vibilité à 15 mètres de fond était encore d'une trentaine de mètres(*). Les locaux on ce point commun avec les Irlandais : ils sont "easy-going". Le seul autre véritable point commun que j'aie trouvé entre notre destination et l'Irlande, c'est l'uniformité du ciel. Pas la couleur, hein, juste l'uniformité de leur couleur respective.

Bref, de retour à Athlone, je propose (pourquoi pas) une réunion de travail avec mes 2 irlandaises. Malheur ! L'une d'entre elles avait dû passer 3 jours à l'hôpital pendant mon absence ! Elles n'avaient donc pas pu travailler du tout. Me voilà donc à travailler sur le plan entier. Il faut dire que l'une d'entre elle n'a pas d'ordinateur chez elle (l'Institute est ouvert en vacances sur les même horaires que d'habitude : de 8h à 21h, et propose un nombre suffisant d'ordinateurs en libre service et sous Windows pour que chacun trouve sa place).

Quand on sait que l'abonnement à 3Mo/s tourne autour de 70 euros ici alors qu'en France plusieurs fournisseurs d'accès sont en train de poser de la fibre optique dans les grandes villes (bientôt chez moi !!) pour atteindre 70Mo/s, avec le téléphone gratuit vers des dizaines de pays, et des centaines de chaînes télévisées, le tout pour moins de 30 euros par mois, ça explique un peu cette fracture. Ce n'est qu'un constat, je ne suis pas en train de dire que l'Irlande est un pays en voie de développement. C'est un passage obligé. Je me rappelle quand nous avons eu à la maison notre première connection à l'ADSL, 512Ko/s, c'était la fête, et il n'y a pas si longtemps que ça. Nous français, on doit bien faire rigoler les Japonais avec leurs "backbone" (la grosse fibre qu'on met sous les rues prinpales) à plusieurs To/s (1To = 1024Go, 1Go = 1024Mo, 1Mo = 1024Ko, donc combien de Ko fait 1To ?). Il faut relativiser (les derniers tests font état de plus de 28To/s sur une distance de 80 Km, soit 600 DVDs transférés en une seconde... et 1DVD = 4,7Go).

J'en viens à l'anecdote dont je parlais au début. Un de mes compatriote s'est retrouvé dans une équipe de 2, avec un Irlandais. Ce dernier, très motivé, a tapé tout le Business Plan tout seul, 2 mois avant la date de rendu. Et l'a donné au français sous forme papier. En regardant le tas de feuilles, mon ami s'est rendu compte que l'Irlandais n'avait pas fait de paragraphes, avait mis des titres un peu n'importe comment. S'en est suivi la conversation suivante (je traduis) :
- Super, il y a au moins 50 pages, là !
- Ouais, j'avais plein de choses à dire.
- Bon, ben ce que je vais faire, c'est mettrre un peu d'ordre dans les chapîtres. Je peux te passer ma clef USB, pour que tu m'y mettes le dossier ?
- Le dossier ? Mais tu l'as devant toi !
- Oui, mais si je veux faire des modifications, je vais les faire sur ordinateur !
- Mais je ne l'ai pas, le dossier !
- Ben tu ne l'as pas chez toi ?
- Non, j'ai juste un ordinateur chez moi !
- Mais il est sur ton PC, non ?
- Bah non, je l'ai imprimé !
- Bon, tu l'as imprimé, donc tu l'as sur ton PC !
- Non, je tape une ou deux feuilles, puis j'imprime.
- Et tu sauvegardes !
- Je quoi ?
- ... [non traduit] Oh putain...

Voilà, il ne savait pas sauvegarder un fichier. Le travail du français a été de retaper tout le dossier pour pouvoir y mettre une vraie mise en page.

A pars ça, on n'a toujours pas Internet à la maison.