La France diplomatique
Un (millionnaire) Américain s'extasie devant la perfection d'un jardin anglais et demande combien il faut payer pour avoir ce résultat. L'Anglais répond : "beaucoup de passion et de soin, de patience, de dévouement, et surtout des siècles d'entretien".
Un français normal, un peu au courant de l'Histoire de France et de ce qui se passe dans le monde, conscient du rayonnement que la France devrait avoir (culturel, mais aussi diplomatique, juridique, artistique, littéraire...), doit comme moi secrètement rêver avec nostalgie de cette époque - il n'y a qu'un siècle, - où le français était la langue internationale, parlée par tous les gens éduqués dans le monde occidental et oriental. Non, désolé, rien à dire sur l'austral, je parle de culture, pas de culturisme.
De cette époque il ne nous reste que quelques cendres fumantes. La 2de guerre d'Irak a été la nouvelle preuve douloureuse que, malgré une stendinne ovéhicheunne de l'Assemblée des Nations-Unies en ce fameux 14 février 2003 pour applaudir - alors que c'est interdit - une tirade historique de notre ministre des Affaires étrangères de l'époque, l'unité internationale ne put se faire, puisqu'elle aurait été à l'opposé de ce que cherchaient les musculeux Américains.
"Et c'est un vieux pays, la France, un vieux continent comme le mien, l'Europe, qui vous le dit aujourd'hui, qui a connu les guerres, l'Occupation, la barbarie. Un pays qui n'oublie pas et qui sait tout ce qu'il doit aux combattants de la liberté venus d'Amérique et d'ailleurs. Et qui pourtant n'a cessé de se tenir debout face à l'Histoire et devant les hommes. Fidèles à ses valeurs, il veut agir résolument avec tous les membres de la communauté internationale."
C'était beau. C'était la France et c'était beau : un vibrant hommage à cette époque centenaire où les discours politiques, écrits presque littéraires, étaient lus pour transporter des foules qui n'y comprenaient pas toujours grand chose. D'ailleurs, unanime fut la Nation, sursautant, interloquée, se regroupant pour lever le poing derrière ce fougueux ministre en costume trop large qui voulait agiter l'étendard tricolore sous le nez du tout-puissant et de sa petite copine la Perfide. Le poing levé rassemble les foules, en France.
Resplendissante, si belle, cette idée de la Justice que toutes les patries en paix pourraient ensemble recueillir et présenter dans une bienveillance paternelle à cette soeur malade, l'Irak la moustachue, en se reposant sur la mémoire séculaire des souffrances que toutes nos générations ont vécu, les unes après les autres, jusqu'à nos pauvres grands-parents.
Que l'on puisse au moins se partager équitablement le pétrole entre nations occidentales, salauds ! C'est trop facile de tout raser puis de s'embaucher pour reconstruire aux frais de la communauté internationale, en prenant des airs de sauveurs de la démocratie. Non Monsieur. Nous le savons mieux que quiconque : la démocratie vient du peuple qui doit vouloir l'obtenir, certainement pas de la soldatesque américaine.
Les symptômes sont toujours les mêmes : les Français y nous emmerdent à donner leur avis, pour qui y s'prennent ceux-là. Alors qu'on va se faire une petite guerre éclair, mon petit Tony, j'te dis que ça.
- C'est ça, comme en Quatorze.
Bref, montée sur ses ergots, la France a traversé le désert en matière diplomatique de son côté pendant que Tony et George bombaient le torse en souriant - et en descendant chaque jour un peu plus dans les sables mouvants du désert de paix.
4.000 djiahizes plus tard, on s'est rendu compte que depuis l'Occident, un Chiite, ça ressemble vachement à un Sunnite, et qu'un terroriste, ça ressemble vachement à un civil. Ou l'inverse.
2007. La France rattrape d'un geste élégant le rideau qui tombe sur l'Axe du Bien et se hisse sur la scène en saluant bien bas. Applaudissements, s'il vous plaît. Elle entend bien faire payer sa participation, faire ravaler leur salive à ceux qui lui ont donné le désagréable rôle de Cassandre. En France, quand on avale de travers, on se repose contre le dossier de sa chaise le temps de reprendre ses esprits, puis on recrache, avec tout plein d'acide gastrique. La France, la grande.
C'est très fin, d'ailleurs, mais en suivant d'heure en heure le déroulé des événements grâce à l'AFP (Agence France Presse, pas American Free Press ni Australian Federal Police), on constate que les pions avancent à grand pas. Faut dire que l'adversaire a les pieds dans la boue jusqu'aux genoux.
Premier coup : Kouchner se rend en Irak et rencontre le gouvernement. La France se pose en conciliateur pour mettre un terme à la guerre, et rappelle l'existance de l'ONU. Très bon accueil des Irakiens qui se souviennent de l'opposition à la guerre de la France.
Deuxième coup : Sarkozy se refait son bronzage aux États-Unis et rappelle que la France n'est pas qu'un pays obtu et braqué. Il fait miroiter un retour de la France aux côtés des Américains sur certaines positions. "Nos cousins les Ricains". Bush a les yeux qui brillent, l'oreille alerte. C'est qu'il faut finir 8 ans de règne sur du positif et ça fait 8 ans que c'est mal parti.
Troisième coup : Bernard téléphone à Condoleezza et lui dit : "écoute, il faut changer de Premier ministre, Maliki, personne ne l'aime. Il doit être remplacé". Elle ne réagit pas ? Tant pis pour elle.
Quatrième coup : il fait une annonce publique de sa proposition, dans laquelle il souligne que Bush "semble très attaché à Maliki", mais que tout le monde veut qu'il parte.
Cinquième coup : le sénateur Hillary Clinton, qui a compris le mouvement et qui brigue la mandature démocrate, déclare à son tour que Maliki doit partir. A l'Ouest, du nouveau.
Sixième coup : Kouchner, qui a ainsi pu vérifier que ça embraillait, passe la seconde : Abdoul Mahdi [actuellement l'un des vice-présidents] a tout à fait le profil. "Il est solide. Parmi les personnes qui sont disponibles, il est largement considéré comme l'un de ceux qui pourraient avoir le poste". Notez comme moi que "l'un de ceux", ça veut dire qu'il y en a d'autres, mais tourné comme ça on a l'impression qu'il est le seul.
Septième coup : Le Premier ministre irakien s'insurge naturellement de se voir montrer la porte sans préavis et demande réparation et excuses indignées à la France. Bush va devoir prendre position et choisir de soutenir soit Maliki que l'on dit seul, soit la France et tout ce qu'elle représente en termes de sauvetage de face.
Et Kouchner de rajouter, subtile, une main tendue et l'autre levée : "Mahdi, c'est un gars impressionnant... et pas seulement parce qu'il a étudié en France".
J'les entends d'ici grincer, les dents à Dobeuliou. C'est une grosse concession qu'il va devoir faire, et pas une concession de pétrole cette fois-ci.
Des siècles de diplomatie, mon petit George.
Un français normal, un peu au courant de l'Histoire de France et de ce qui se passe dans le monde, conscient du rayonnement que la France devrait avoir (culturel, mais aussi diplomatique, juridique, artistique, littéraire...), doit comme moi secrètement rêver avec nostalgie de cette époque - il n'y a qu'un siècle, - où le français était la langue internationale, parlée par tous les gens éduqués dans le monde occidental et oriental. Non, désolé, rien à dire sur l'austral, je parle de culture, pas de culturisme.
De cette époque il ne nous reste que quelques cendres fumantes. La 2de guerre d'Irak a été la nouvelle preuve douloureuse que, malgré une stendinne ovéhicheunne de l'Assemblée des Nations-Unies en ce fameux 14 février 2003 pour applaudir - alors que c'est interdit - une tirade historique de notre ministre des Affaires étrangères de l'époque, l'unité internationale ne put se faire, puisqu'elle aurait été à l'opposé de ce que cherchaient les musculeux Américains.
"Et c'est un vieux pays, la France, un vieux continent comme le mien, l'Europe, qui vous le dit aujourd'hui, qui a connu les guerres, l'Occupation, la barbarie. Un pays qui n'oublie pas et qui sait tout ce qu'il doit aux combattants de la liberté venus d'Amérique et d'ailleurs. Et qui pourtant n'a cessé de se tenir debout face à l'Histoire et devant les hommes. Fidèles à ses valeurs, il veut agir résolument avec tous les membres de la communauté internationale."
C'était beau. C'était la France et c'était beau : un vibrant hommage à cette époque centenaire où les discours politiques, écrits presque littéraires, étaient lus pour transporter des foules qui n'y comprenaient pas toujours grand chose. D'ailleurs, unanime fut la Nation, sursautant, interloquée, se regroupant pour lever le poing derrière ce fougueux ministre en costume trop large qui voulait agiter l'étendard tricolore sous le nez du tout-puissant et de sa petite copine la Perfide. Le poing levé rassemble les foules, en France.
Resplendissante, si belle, cette idée de la Justice que toutes les patries en paix pourraient ensemble recueillir et présenter dans une bienveillance paternelle à cette soeur malade, l'Irak la moustachue, en se reposant sur la mémoire séculaire des souffrances que toutes nos générations ont vécu, les unes après les autres, jusqu'à nos pauvres grands-parents.
Que l'on puisse au moins se partager équitablement le pétrole entre nations occidentales, salauds ! C'est trop facile de tout raser puis de s'embaucher pour reconstruire aux frais de la communauté internationale, en prenant des airs de sauveurs de la démocratie. Non Monsieur. Nous le savons mieux que quiconque : la démocratie vient du peuple qui doit vouloir l'obtenir, certainement pas de la soldatesque américaine.
Les symptômes sont toujours les mêmes : les Français y nous emmerdent à donner leur avis, pour qui y s'prennent ceux-là. Alors qu'on va se faire une petite guerre éclair, mon petit Tony, j'te dis que ça.
- C'est ça, comme en Quatorze.
Bref, montée sur ses ergots, la France a traversé le désert en matière diplomatique de son côté pendant que Tony et George bombaient le torse en souriant - et en descendant chaque jour un peu plus dans les sables mouvants du désert de paix.
4.000 djiahizes plus tard, on s'est rendu compte que depuis l'Occident, un Chiite, ça ressemble vachement à un Sunnite, et qu'un terroriste, ça ressemble vachement à un civil. Ou l'inverse.
2007. La France rattrape d'un geste élégant le rideau qui tombe sur l'Axe du Bien et se hisse sur la scène en saluant bien bas. Applaudissements, s'il vous plaît. Elle entend bien faire payer sa participation, faire ravaler leur salive à ceux qui lui ont donné le désagréable rôle de Cassandre. En France, quand on avale de travers, on se repose contre le dossier de sa chaise le temps de reprendre ses esprits, puis on recrache, avec tout plein d'acide gastrique. La France, la grande.
C'est très fin, d'ailleurs, mais en suivant d'heure en heure le déroulé des événements grâce à l'AFP (Agence France Presse, pas American Free Press ni Australian Federal Police), on constate que les pions avancent à grand pas. Faut dire que l'adversaire a les pieds dans la boue jusqu'aux genoux.
Premier coup : Kouchner se rend en Irak et rencontre le gouvernement. La France se pose en conciliateur pour mettre un terme à la guerre, et rappelle l'existance de l'ONU. Très bon accueil des Irakiens qui se souviennent de l'opposition à la guerre de la France.
Deuxième coup : Sarkozy se refait son bronzage aux États-Unis et rappelle que la France n'est pas qu'un pays obtu et braqué. Il fait miroiter un retour de la France aux côtés des Américains sur certaines positions. "Nos cousins les Ricains". Bush a les yeux qui brillent, l'oreille alerte. C'est qu'il faut finir 8 ans de règne sur du positif et ça fait 8 ans que c'est mal parti.
Troisième coup : Bernard téléphone à Condoleezza et lui dit : "écoute, il faut changer de Premier ministre, Maliki, personne ne l'aime. Il doit être remplacé". Elle ne réagit pas ? Tant pis pour elle.
Quatrième coup : il fait une annonce publique de sa proposition, dans laquelle il souligne que Bush "semble très attaché à Maliki", mais que tout le monde veut qu'il parte.
Cinquième coup : le sénateur Hillary Clinton, qui a compris le mouvement et qui brigue la mandature démocrate, déclare à son tour que Maliki doit partir. A l'Ouest, du nouveau.
Sixième coup : Kouchner, qui a ainsi pu vérifier que ça embraillait, passe la seconde : Abdoul Mahdi [actuellement l'un des vice-présidents] a tout à fait le profil. "Il est solide. Parmi les personnes qui sont disponibles, il est largement considéré comme l'un de ceux qui pourraient avoir le poste". Notez comme moi que "l'un de ceux", ça veut dire qu'il y en a d'autres, mais tourné comme ça on a l'impression qu'il est le seul.
Septième coup : Le Premier ministre irakien s'insurge naturellement de se voir montrer la porte sans préavis et demande réparation et excuses indignées à la France. Bush va devoir prendre position et choisir de soutenir soit Maliki que l'on dit seul, soit la France et tout ce qu'elle représente en termes de sauvetage de face.
Et Kouchner de rajouter, subtile, une main tendue et l'autre levée : "Mahdi, c'est un gars impressionnant... et pas seulement parce qu'il a étudié en France".
J'les entends d'ici grincer, les dents à Dobeuliou. C'est une grosse concession qu'il va devoir faire, et pas une concession de pétrole cette fois-ci.
Des siècles de diplomatie, mon petit George.
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